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Casa Susanna

2022

Société

France

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Sébastien Lifshitz dévoile l’histoire inédite d’une communauté de travestis dans l’Amérique des années 1950-1960.

Sur un plateau télé, quatre femmes sont alignées sur un canapé. Elles portent des diadèmes et des robes sexy. Hors champ, une voix masculine demande à la première : "Ce sont vos vrais cils ?" "Non", répond-elle. Puis la voix questionne une élégante blonde prénommée Simone : "Où avez-vous acheté cette robe ?" "Je l'ai faite moi-même", répond-elle. Face caméra désormais, le présentateur révèle que derrière ces "charmantes candidates" se cachent des hommes, donc des hors-la-loi. Par cette archive introductive, le réalisateur Sébastien Lifshitz pose d'emblée le contexte historique. Dans l'Amérique puritaine des années 1960, se travestir est un délit et une prise de risque énorme. C'est cette histoire secrète qu'il s'apprête à raconter : celle d'une communauté de travestis se réunissant régulièrement dans une maison isolée des Catskills, un havre montagneux de l'État de New York, pour y vivre librement leur identité féminine. Près de soixante ans plus tard, le réalisateur filme Kate et Diana, deux membres de la Casa Susanna, ce lieu d'affranchissement collectif qui a changé leur vie. Dans la lumière rasante d'une fin d'après-midi, face à la maison en bardage blanc encore debout, Kate raconte : "Pour la première fois, je pouvais parler de choses que je n'imaginais même pas." Diana se souvient, elle, de son émotion quand, à peine entrée dans la maison, elle se voit proposer une mise en pli. "Personne ne m'avait jamais coiffée. Gloria m'a offert des talons. Les gens me sifflaient. C'était incroyable à quel point ces petits plaisirs étaient palpitants."

Vies parallèles
Pendant dix ans, ces réunions clandestines ont été photographiées pour composer des albums-souvenirs à usage privé. Découverte par hasard par un couple d'antiquaires, l'exceptionnelle collection de photos amateurs qui a documenté ce phalanstère a permis de faire renaître en images ces séjours où, habillées en femmes chics de la ville, les habituées de la Casa Susanna s'organisaient une vie parallèle à l'écart d'un monde qui les réprimait. "Entre le CE2 et le CM1, je m'endormais en priant pour que je me réveille en fille", raconte Diana qui a grandi dans l'Iowa, élevée par une mère luthérienne pratiquante, considérant les travestis comme des malades à réparer à coup d'électrochocs. En croisant les points de vue, à travers les témoignages souvent poignants des protagonistes directs mais aussi de leurs descendants, Sébastien Lifshitz recompose le puzzle de cette poche de résistance passée sous silence et en révèle l'audace folle.

Galerie photos

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